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Roberto BARBANTI "La question de l'ultramedialité" in : 3rd International Art Meeting, Katowice 2000, J. Bury (dir.), Catalogue de festival. Katowice, Pl. : Galeria Sztuki Wspolczesnej BWA Katowice, 2002.

 

La question de l’ultramedialité

Poser la problématique du rayonnement électromagnétique et des différentes formes de rayonnement infra et supra liminal dans l’art, signifie poser la question esthétique - l’aisthêtikos : le sentir, le percevoir - dans toute son ampleur. Cette question du sensorium n’est plus pensable aujourd’hui en dehors de celle de la technique. En effet, les modalités de perception, le statut de l’art, celui du medium et de l’image, la matérialité de l’œuvre et son "essence", etc., sont toutes des problématiques intimement liées au devenir actuel du phénomène technique.

Je travaille depuis la fin des années quatre-vingt autour d’un ensemble d’"outils" conceptuels (au sens théorico/philosophique et artistique du terme), qui concernent aussi bien le domaine spécifique de l’art que celui plus général du devenir collectif, ce qui m’a amené à forger une notion nouvelle : celle d’ultramedialité.

Cette problématique du dépassement du medium (ultra-media) a été posée dans l’art par Marcel Duchamp, mais sa "réalité" a éclaté au grand jour à partir des années cinquante pour ensuite se généraliser et se manifester, d’une façon toujours plus évidente, dans les arts électroniques.

Ces derniers s’inscrivent, eux aussi, dans la dynamique du phénomène technique. Penser les arts électroniques (ou l’art technologique ou l’art des nouveaux media, etc., selon les appellations aujourd’hui utilisées) (1) en dehors du phénomène technique lui-même est une erreur aussi fréquente que répandue, même si cette relation est, de toute évidence, incontournable. Cela non seulement pour des indéniables raisons concernant l’origine et l’histoire de ces modalités d’expression ainsi que la nature intrinsèque des media utilisés, mais aussi à cause de la convergence et de l’assimilation, progressive et systématique, des problématiques théoriques et "idéologiques" entre ces deux univers, convergence qui concerne également leurs dynamiques factuelles et leurs procédures opérationnelles.

Il faut donc, de toute évidence, partir de la technique pour aborder toute problématique concernant le sensorium et l’art, et nous poser la question suivante : quelle est la nature de ce phénomène?

Comme l’affirme Jacques Ellul, le phénomène technique se manifeste par une volonté qui aspire à "transformer toute chose en moyen" (2) pour "rechercher en toute choses la méthode absolument la plus efficace" (3) "en se fondant, il ajoute, sur le calcul, dans la plupart des cas" (4). Autrement dit, comme on pourrait l’affirmer avec Heidegger, le phénomène technique, ou la "technique" tout court, est la manifestation en acte d’une "pensée calculante", et cette "pensée calculante" est au fond l’aspect intrinsèque de la technique en tant que telle, ce qui la définit pour ce qui lui est propre.

Aujourd’hui, le phénomène technique se dévoile d’une façon particulière. Comment se manifeste donc, à présent, cette volonté de "transformer toute chose en moyen"? Quelle forme assume cette "pensée calculante"?

On perçoit actuellement une tendance fondamentale qui met aussi sous un nouveau jour la nature de ce phénomène dans sa totalité. Comme je l’ai affirmé plus haut, j’ai appelé cette tendance fondamentale la dimension ultra-media : l’ultramedialité (5). Voyons de plus près ce que j’entends par là.

Par "ultra-media" j’entends une dynamique profonde de "disparition-généralisation" du medium, le medium étant : l’élément intermédiaire entre le sujet et l’objet. En définitive avec medium je désigne l’objet technique, la matérialisation concrète du phénomène technique. Or, aujourd’hui, nous assistons à une "disparition" de ce medium : la matérialité de la technique tend à "fondre", à se diluer, dans une sorte d’immatérialité et de dimension informationnelle. En même temps, dans cette nouvelle modalité d’être elle tend aussi à se diffuser partout, à pénétrer chaque aspect du réel, à se greffer, s’hybrider à toute réalité physique et "méta-physique" (en entendant ici, d’une façon réductive, par "méta-physique" la dimension psychologique : mentale et affective)

L’ultramedialité correspond à une réalité très complexe qui, pour ce qui nous intéresse ici particulièrement, peut être analysée sous l’angle de deux phénomènes distincts, qui sont très étroitement reliés et interdépendants : d’un côté, par ce mot, j’indique l’actualisation d’une nouvelle phase de la technique (qui, en quelque sorte, jette une nouvelle lumière aussi sur les phases précédentes et la nature intime de ce phénomène lui-même) et de l’autre je désigne l’élément de fond qui relie les multiples et différents positionnements artistiques de notre temps. Cet élément, qui correspond, en profondeur, aux principales modalités et attitudes développées par les artistes de prendre en compte la dimension technique elle-même, a déterminé la nature intrinsèque du phénomène esthétique et artistique du XXème siècle.

Analysons tout d’abord, d’un point de vue général, ce qui concerne cette "disparition - généralisation", ce "dépassement - saturation", du medium : cet aller "au-delà" (ultra) du medium.

Cette "disparition - généralisation" renvoie à une mutation profonde survenue au XIXème siècle. En effet, c’est à ce moment qu’eut lieu cet énorme processus d’application, sur une large échelle, d’un ensemble très différencié de découvertes et d’innovations scientifiques. Ce processus amena à l’exploitation industrielle de la chimie, de l’électricité et de l’électromagnétisme, ainsi qu’à la progressive diffusion et généralisation des instruments et des dispositifs aptes à contenir les différentes formes de mémoire visuelle et acoustique (dont on verra l’importance pour ce qui concerne l’ultramedialité dans l’art). C’est là que nous pouvons situer la naissance de cette civilisation informationelle et immatérielle qui est la nôtre : là où, pour parler dans les termes de Lewis Mumford, l’âge "paléotechnique" du "capitalisme carbonifère" et de l’acier commence à décliner (6).

Cette dynamique a subi une accélération exceptionnelle, qui correspond à un saut qualitatif sans précédent et donc à une véritable rupture épistémologique, à partir de la deuxième guerre mondiale, avec les recherches sur l’atome, sur l’élaboration quantitative et binaire de l’information et sur la structure de l’ADN (7).

C’est à ce moment que nous rentrons, à proprement parler, dans une dynamique collective et massive de l’ultramedialité. La dimension infinitésimale et immatérielle de ces techniques (de la chimie aux biotechnologies, en passant par l’électricité et l’atome) fonde, pour ainsi dire, la "matérialité" factuelle de cette réalité. En effet, c’est à partir de cette nouvelle phase opérationnelle du développement technique, totalement centrée sur le côté immatériel, que l’ultramedialité prend forme au sens fort.

La technique, en tant que volonté de réduire "toute chose en moyen" et "pensée calculante", a toujours été l’expression et la manifestation d’une dimension abstraite : on pourrait même affirmer que la technique dans sa première détermination est pure abstraction. Cependant, la capacité applicative de travailler matériellement à un niveau immatériel se manifeste, d’une façon socialement importante, seulement, comme on vient de le dire, à partir du XIXe siècle.

Cette dynamique ultra-media nous oblige aujourd’hui à prendre conscience d’une question fondamentale : l’aspect le plus important de la force et du projet de la technique, autrement dit de la volonté de la technique, réside dans l’espoir et la possibilité effective qu’elle puisse, en tant qu’élément maîtrisable, planifiable et programmable se substituer à la nature : rentrer en elle et la dominer de l’intérieur pour la rendre plus domestiquée, efficace et rentable, c’est-à-dire, au fond, pour essayer d’évincer toute "contrainte" spatio-temporelle. En effet, c’est cette caractéristique de vouloir annihiler toute "contrainte" spatio-temporelle, qui, dès nos jours et dans une immense majorité de cas, est à la base de cette pensée calculante et qui motive cette volonté de réduire toute chose à un moyen (8).

Cette volonté de domination aspire donc aujourd’hui, d’une façon évidente, à briser toute barrière entre technè et bios, autrement dit, entre "artifice" et "nature". Le phénomène technique tend à se dissimuler dans la nature et à se l’approprier.

Cette tendance, que j’ai donc appelée ultra-media, se manifeste du point de vue physique par une croissante "nanotechnicisation", "molécularisation", "atomisation" et "génétisation" de la production "matérielle" (qui est ainsi tendanciellement asservie et modelée selon nos projets imaginés et nos images projetées) et du point de vue "méta-physique" par une croissante adéquation et mise à disposition de tout individu à l’image, c’est-à-dire à des modèles abstraits, préconçus, partiels et généralisés, de représentation du réel ou alors, d’une façon spéculaire, de projection dans le réel de nos représentations.

Cela implique d’une façon tendancielle un processus d’hybridation entre le sujet et l’objet qui porte à exclure toute médiation entre ces deux déterminations, ce qui signifie non pas un retour au "sujet collectif" pré-moderne, mais la mise à disposition du sujet actuel au dispositif technique.

 

"Neutralisation" du sensorium

L’effet de ce processus global (disparition du medium et asservissement à l’image, ainsi que l’hybridation entre le sujet et l’objet) sur l’appareil sensoriel humain, le sensorium, est que celui-ci est progressivement rendu incapable de percevoir et de détecter la réalité telle qu’elle est crée par nous-mêmes. C’est déjà, et largement, un état de fait. Le sensorium devient un épiphénomène dont la nécessité (c’est-à-dire la capacité qu’il avait de nous orienter dans le réel et par là même de nous guider, d’une façon littéralement sensée, dans nos choix) devient de plus en plus secondaire pour ne pas dire nulle. Autrement dit le medium, l’aspect matériel du phénomène technique, en disparaissant tend à absorber en lui-même ces deux "anciennes" déterminations qui sont le sujet et l’objet, en créant ainsi des conditions nouvelles dans la perception.

Cette "annihilation" du sensorium, dans sa fonction fondamentale de repère et référent ontologique, a comme revers complémentaire la production d’un univers global de représentation et de simulation. À un monde réel qui nous échappe totalement correspond donc la réduction en image codifiée de notre réalité. C’est l’image de nous même qui, "pré-figurée" et "pré-déterminée", devient instantanée et ubiquitaire. Et c’est ainsi que les individus, progressivement assujettis à des modèles de représentation formelle et cognitive qui n’admettent aucune ambiguïté et qui nous sollicitent et nous interpellent de plus en plus, sont mis à sa disposition (9).

Mais comment cette progressive "neutralisation" des différentes modalités perceptives se passe-t-elle concrètement?

Cela se passe principalement non pas tant par une forme d’ "abaissement" de ces mêmes capacités, mais plutôt par la modification radicale du contexte, qui est, au fur et à mesure, construit au-delà des seuils physiologiques absolus qui leurs sont propres, et par la modification radicale des grilles signifiantes et des modalités - autrement dit, des modèles et des conditions - de perception (10).

Cette affirmation sur la "neutralisation" du sensorium, malgré son aspect abstrait et à l’apparence excessive (après tout, on continue bien à percevoir le monde environnant) correspond, en vérité, à un état tout à fait factuel, même si non directement perceptible par nos sens. En effet, aussi paradoxal que cela puisse paraître, sans l’intermédiaire des différentes machines et instruments d’analyse et de mesure (11) nous serions désormais dans l’impossibilité, non seulement de détecter la "substance" de ce monde, mais tout "simplement", de pouvoir y vivre. Le fait est que la réalité, telle qu’elle est produite par le dispositif techno-économique actuel, est devenue essentiellement insaisissable. N’importe quel processus de production industriel met en jeux un ensemble d’ "éléments" dont nous ne sommes plus capables ni d’identifier les composantes, ni de juger de leur degré de persistance ou simplement de présence dans notre vie de tout les jours. En effet, la dimension ultra-media du phénomène technique n’est pas seulement une dynamique exponentielle de miniaturisation du dispositif technique qui s’intègre au vivant, dans sa nature énergétique et informationnelle, mais aussi une réalité bien plus vaste qui concerne l’ensemble de la production matérielle et industrielle : pour l’essentiel, celle-ci échappe désormais, dans son être et dans son devenir, à tout contrôle sensoriel (12).

Avant de conclure sur ce point, il faut préciser que l’affirmation ici soutenue d’une "neutralisation" du sensorium ne veut pas dire que le sensorium n’a plus aucun rôle à jouer, bien au contraire! Ce qui reste central est de saisir l’importance et la nouveauté de cette nouvelle condition à laquelle le sensorium se trouve aujourd’hui confronté.

 

L’art et l’ultramedialité

Voyons maintenant cette dynamique ultra-media dans les implications qui concernent directement l’univers de l’art.

La problématique esthétique trouve dans la dimension ultra-media la raison et le cadre qui permettent de lui donner une base explicative. En effet, tout au long du XXème siècle les manifestations de la créativité artistique renvoient elles aussi, en quelque sorte, à cette dynamique profonde de "disparition-généralisation" du medium. Il faut préciser que cette dynamique ultra-media de l’art n’est pas une conséquence, un épiphénomène d’un processus plus important, le processus technique, qui l’engendrerait de l’extérieur d’une façon déterministe, mais elle est un moment fondamental de ce même processus, elle est partie prenante dans cette révolution de l’ultramedialité.

Cependant, à l’origine, ce sont bien des modifications techniques qui vont changer radicalement les modalités d’être spécifiques à l’art. A partir du début du XIXe siècle, trois révolutions capitales se mettent en place : celle de la mémoire visuelle, celle de la mémoire acoustique et celle de la transmission/échange de l’information. Pour résumer en trois date ce processus il suffit de citer l’année 1839 et l’ "invention" du daguerréotype, l’année 1877 et le phonographe d’Edison et l’année 1899 avec la première liaison par télégraphe sans fil au dessus de la manche réalisée par Guglielmo Marconi, date qui marque le début (avec celle de l’invention du télégraphe en 1845 par Morse) de l’ère de la transmission de l’information et de la communication moderne.

Aujourd’hui ce cadre apparaît ultérieurement modifié puisque les données ont encore une fois changé radicalement, en passant, pour ainsi dire, d’une dynamique de la "mémoire" à une autre de la "pré-vision", de celle de l’ "information" à celle de l’ "in-formation". Ce qui implique et signifie, sur le plan esthético-artistique, une tendance à la formalisation généralisée de tout type d’image ainsi qu’à l’accomplissement de ce long processus, commencé avec le télégraphe, la photo et le phonographe, et accéléré dans les années 30 et 40 du XXème avec les "canaux de transmission technique" spatio-temporels (la radio et le magnétophone), comme les a appelé Abraham A. Moles (13), vers une capacité de dépassement de l’espace/temps dans l’instantanéité et l’ubiquité. Ce processus s’inscrit dans celui du déploiement du phénomène technique dans le réel et correspond à cette nouvelle modalité de constituer, façonner et matricer la matière, organique et inorganique, de l’intérieur : l’information étant ainsi inscrite dès l’origine dans l’ "objet" et non pas "transmise" à celui-ci par la suite.

C’est à cause de tout ceci que, comme nous le savons, les procédures classiques de production matérielle de l’œuvre d’art, ainsi que les modalités techniques et les visées conceptuelles et expressives de cette même production, subissent une mutation substantielle.

En ce qui concerne les arts visuels, on peut énoncer trois conséquences fondamentales : une crise profonde des procédures "traditionnelles" de représentation du réel, la fin de la notion d’œuvre, en "perte d’aura", et enfin le déclin de celle d’objet, qui s’effrite dans une dynamique immatérielle et processuelle.

Ces trois changements, profondément impliqués les uns dans les autres, peuvent être reconduits à un dénominateur commun : le medium, en tant qu’objet, œuvre, matérialisation technique, tend à disparaître tout en se généralisant.

Du point de vue historique, la conscience de cette profonde mutation se manifeste dans la "production" artistique dès le début du siècle. On pourrait retenir l’année 1909 comme date symbolique de ce passage (avec le Manifeste Futuriste, le début de l’abstraction avec Kandinsky et la mise en place de la démarche cubiste chez Picasso et Braque), mais, en réalité, le véritable basculement s’opère en 1913 avec le ready made de Duchamp. C’est une histoire connue dont les contenus essentiels nécessitent simplement d’être, encore une fois, énoncés afin de situer cette problématique dans son contexte : l’aspect formel et son impact sensoriel, deviennent "prétexte" au geste, au choix et à l’intention de l’artiste. Le medium artistique est dépassé. On pourrait dire, avec Pierre Restany, que l’art bascule de l’esthétique à l’ "éthique" (14).

L’art n’est plus appelé à "nourrir les sens", mais plutôt à "donner du sens", en manifestant un positionnement critique et de perspective. Un art qui génère des modèles alternatifs et qui devient le laboratoire vivant d’une réflexion et d’une exploration de l’ensemble de ces modifications, aussi bien pour ce qui concerne le medium et le sensorium que la dynamique sociale.

Le slogan "l’art c’est la vie" (forgé entre les années cinquante et soixante) traduit d’une manière exemplairement claire ce rôle fondateur et fondamental, joué par les artistes au XXème siècle, d’expérimentateurs sociaux des horizons et des modèles collectifs perceptifs et existentiels. En se refusant à la "re-présentation" et à toute logique purement perceptive-formelle, ils rentrent dans une dynamique de la "présentation". "Présentation" de toutes les possibles modalités d’ "être". C’est là qu’il y a "dépassement-généralisation" du medium artistique - l’œuvre - qui s’intègre et se manifeste par le biais du contexte social, du "cadre" global, de l’environnement, du corps, du concept, de l’objet anodin et quotidien, des "techno-logiques", et cætera. C’est là aussi que, pour aller à l’essentiel en résumant d’une façon abrupte, l’art change de statut, et qu’il abandonne, comme on a vu, une dimension esthétique pour rentrer dans une "tension" éthique. Avec un jeu de mots on pourrait dire qu’il rentre dans une dynamique "esth-éthique" (15). C’est ici que se trouve la nature profonde de l’art du XXe siècle et son véritable "esprit".

À partir de Duchamp, la dynamique fondamentale et la plus représentative de "son/notre" temps, est celle-ci. L’histoire de l’art de ce siècle est une suite d’événements qui exemplifient cette nouvelle situation. De l’attitude "franciscaine" d’un Hugo Ball à la critique révolutionnaire lettriste, jusqu’au Happening, à la Performance, au Body Art, à l’Art Conceptuel ou encore au travail d’un John Cage, d’un Joseph Beuys, d’un Robert Filliou et aux projets d’un Kit Galloway et d’une Sherrie Rabinowitz, d’un Mountadas, d’un Mit Mitropoulos, d’un Fred Forest, etc : tous ces mouvements et protagonistes de l’art de notre temps sont l’expression d’une dynamique qui est avant tout manifestation d’une "éthique" à l’œuvre, ainsi que l’exemplification parlante et éclatante de ce dépassement du medium et de sa thématisation. Autrement dit d’une pratique artistique qui est essentiellement choix, projet critique et éthique dans le devenir esthétique.

Cette dynamique ultra-media des artistes du XXe siècle est donc l’expression d’un nouveau positionnement qui dépasse largement une simple réaction aux problématiques de la représentation et de l’œuvre. Nous sommes, en quelque sorte, bien au-delà d’un questionnement purement formel, puisque ce qui est en jeu est le statut, le rôle et la possibilité de la perception même et, au-delà de ceci, le destin de l’art et de l’humain. En effet, ce processus de "dépassement" de l’esthétique, avant d’être une forme d’innovation ou d’actualisation des écritures artistiques, est la modalité d’être d’une tentative ultime, opérée d’abord par les avant-gardes historiques et repris à maintes fois tout au long de ce siècle, de trouver des réponses et des modalités relationnelles capables d’assumer et de faire face à cette disparition du medium et à cette crise de l’aisthêtikos qui en découle : cette "neutralisation" du sensorium dont on a vu le devenir.

Les problématiques futuristes de l’énergie et des lignes de force, la tentative cubiste de "traduire" picturalement un espace "aux multiples facettes", la quatrième dimension de Duchamp, la prééminence du "spirituel dans l’art" et la recherche de ses fondements universels d’un Kandinsky, etc., peuvent aussi être lus, au-delà de tout problème de langage, comme les premières tentatives de saisir (et de trouver par là des modalités d’expression adéquates) un réel qui a tendance à se voiler et a se "des-esthétiser". Dans cette lignée, on pourrait interpréter les analyses situationnistes sur la société du spectacle comme la prise de conscience radicale et définitive de cette anesthésie générale et de cette paralysie collective auxquelles le mélange entre image et réalité a finalement donné lieu.

La notion de neutralisation du sensorium dans l’art, ne renvoie pas seulement à ce processus globale d’ "an-esthésie" objective et collective, mais aussi à une dynamique très complexe et plus spécifique. Celle-ci se constitue, au départ, dans une dévaluation de toute modalité de reproduction "artisanale" du réel qui aboutit à une industrialisation et technicisation de ces mêmes procédures. Ce processus engendre, par la suite, une inflation généralisée de tout genre d’image qui produit, à son tour, une forme d’accoutumance et de surcharge d’information. Cette pollution constante qui s’étale dans l’espace collectif de notre "bio-techno-sphère" et qui remplit aussi notre temps social, conduit à une sorte d’indifférenciation des informations qui leur enlève tout caractère qualitatif. Le seuil de réception est ainsi artificiellement modifié en aboutissant par là à ce que l’on pourrait définir comme une véritable invalidation de la perception. Par ailleurs, ce même processus d’indifférenciation qualitative produit un effet de déréalisation du réel qui perd ainsi son statut et son fondement d’entité, par définition, opposée à l’image. Comme on vient de le dire, il s’agit d’une dynamique que, depuis Guy Debord, nous connaissons très bien.

Cet aspect, disons "quantitatif", ne doit pas cependant nous induire à penser cette problématique comme étant limitée et réductible à ce seul niveau. Il est certain qu’il existe des implications qualitatives, concernant le sensorium et les modèles cognitifs, dues à ce phénomène qu’est l’ultramedialité. Il serait, par ailleurs, difficilement concevable qu’à un tel bouleversement technique ne correspondent pas de nouvelles modalités de structuration et d’organisation spatiotemporelles ainsi que d’acquisition de la connaissance. Si on ajoute à cela que la technique, comme le soutient Derrick de Kerckhove, a un impact "transparent", c’est-à-dire qui affecte le sensorium d’une façon imperceptible, alors nous devons redoubler de vigilance sur ce sujet qui, capital pour notre avenir, risque de passer, au vrais sens du terme, inaperçu.

Face à cette crise du medium et du sensorium, il y a eu deux réactions différentes de la part des artistes. Pour résumer d’une façon très sommaire on peut dire que : en ce qui concerne les avant-gardes historiques et les néo avant-gardes, on a été confronté à une attitude "antagoniste" et de questionnement critique (perspective que j’ai définie, avec le néologisme, "esth-éthique"). Cette attitude a été complètement renversée par l’émergence, à partir des années quatre-vingt, d’une mouvance que j’appelle techno-cyber, mouvance qui assume à la lettre l’ultramedialité dans un projet applicatif et dont la notion de cyborg représente à la perfection cette volonté fonctionnelle d’intégrer la technique à l’humain en hybridant le medium au corps, perspective qui implicitement vise l’annihilation définitive du sensorium (16).

 

Espace/temps

Nous ne pouvons pas nous attarder dans une analyse plus détaillé de cette mouvence, cependant on pourra mieux la comprendre en inscrivant les problématiques qui la sous-tendent dans un questionnement plus général concernant la notion d’espace/temps.

L’ultramedialité implique l’implosion et la contraction de l’espace/temps ainsi que sa fragmentation, autrement dit son dépassement. Cela se manifeste par une confrontation croissante avec le temps réel. Cependant cette dimension temporelle - du temps réel - n’est pas l’expression d’un déploiement "co-existant" à l’être, mais au contraire d’une contraction, d’une accélération constante du temps. En réalité, nous sommes de plus en plus dans une istantanéitée éclatée, une forme d’ "u-chronie" (comme l’écrit Edmond Couchot), d’ "a-temporalité" perpétuelle. Un "manque de temps", pour le dire en termes prosaïques, qui tend à devenir une absence du temps : un non-temps, tout court.

La tendance de la technique, et avec elle celle des arts électroniques dans leur généralité, réside dans cette accélération du temps, dont l’objectif ultime est son "abolition". Tout voir et tout entendre dans un seul instant, voici ce que l’on vise : l’accélération du montage télé, les rythmes obsessionnels et incantatoires de la techno, le reflex conditionné des jeux vidéo, le zapping de site en site sur internet, etc. sont autant d’exemples de cette boulimie spatiotemporelle.

Donc, il ne s’agit pas d’une possibilité de déploiement temporel, mais au contraire d’une tentative de réduire ce temps aux mêmes dynamiques phénoménologiques du rétinien dans la perception de l’espace, autrement dit : l’istantaneité du coup d’œil (17).

Nous pouvons trouver un exemple et un modèle précis de cette convergence et de ses caractéristiques dans l’image numérique, puisqu’il est désormais évident que nous assistons à une contraction de ces deux entités (l’espace et le temps : l’image dans son actualisation) dans une unité substantielle. En effet, si le temps tend à devenir de l’image, l’image devient du temps, comme nous ont appris Nam June Paik et Bill Viola (18). L’image vidéo est le temps de balayage de l’écran et l’image numérique est le temps de calcul de ses algorithmes. Ces nouvelles images ne sont rien d’autre que de la temporalité rendue visible et par là même une temporalité et une visibilité qui nous échappent : comme l’affirme Edmond Couchot, l’image numérique se caractérise par une dimension à la fois "utopique et uchronique" (19).

En définitive, pour résumer, toute dynamique de la perception semble être confrontée à ce genre de réalité, autrement dit à une annulation tendancielle de l’espace et du temps. En effet, dans la dynamique ultra-media toutes les différentes formes de perception semblent avoir une propension à se rassembler et à s’hybrider sous un seul mode d’existence, une unique forme et modalité d’être de leur apparence phénoménologique : celle d’un constant dépassement.

 

Ultra-vision

La nature de cette "unification" se produit sous le signe d’une nouvelle domination du rétinien. Cette tendance à l’uniformisation est typiquement et intrinsèquement rétinienne. Nous sommes donc loin d’une nouvelle polysensorialité et de l’équilibre "acoustique" (20) théorisé dans les années soixante.

En effet, comme on le sait, McLuhan indiquait dans la dimension visuelle le propre de la culture occidentale, mais il pensait que l’électricité aurait remis en question cette domination sensorielle pour laisser la place à une forme plus "démocratique" de la perception, une forme axée sur la dimension acoustique.

Probablement McLuhan avait trop hâtivement conclu à cette remise en cause globale du rétinien par l’électricité.

En effet, dans son devenir technique, la destinée ultime du medium est de se nier en tant que tel pour se dissoudre et disparaître dans une indifférenciation généralisée. Celui-ci est le message actuel du medium et l’électricité non seulement n’y échappe pas, mais elle est une des manifestations les plus éclatantes de ce même phénomène.

En tant qu’énergie et dimension informationelle, elle active et participe à cette tendance à la dématérialisation qui est le propre du phénomène technique, dont elle illustre très clairement la logique intrinsèque : logique qui consiste à pénétrer chaque aspect du réel pour mieux s’y éclipser. Ses caractéristiques acoustiques de simultanéité et d’ubiquité en font même le modèle ultime de la technique dans son devenir ultra-media, devenir qui tend à annuler toute contrainte d’espace et de temps dans un projet de calculabilité applicative généralisée du réel. Cette caractéristique de calculabilité applicative est essentiellement rétinienne dans le sens qu’elle nécessite pour pouvoir s’appliquer de distance et de séparation : distance et séparation qui sont les attributs les plus intimes du rétinien. En réalité, l’électricité représente le modèle idéal du medium à l’époque de l’ultramedialité. Avec elle on est donc confronté à un paradoxe : elle cache du "rétinien" derrière des apparences "acoustiques".

C’est ainsi que la dimension rétinienne, loin de retrouver une place équilibrée parmi les autres modalités perceptives, tend de plus en plus vers une forme d’exacerbation de ses propres caractéristiques. Le rééquilibrage sensoriel, dont McLuhan avait fait l’hypothèse en tant que conséquence de l’introduction de l’électricité, ne s’est pas produit. Nous vérifions, au contraire, l’affirmation progressive d’un ensemble de modèles axés sur une hyper accentuation du "regard". La dynamique ultra-media de la technique, dont l’électricité n’est qu’une des manifestations parmi les plus importantes, induit et favorise une dynamique cognitive et sensorielle ultra-visuelle (21). Nous sommes donc confrontés à une ambivalence radicale. Nous rentrons dans une "réalité" contradictoire, une réalité qui, sous des apparences "acoustiques" d’interactivité, de multiplicité, de relation immédiate et "touchante", etc., cache une "essence" entièrement programmée et calculée : rétinienne.

Dans cette situation nouvelle, et à l’apparence paradoxale, la domination du rétinien reste donc intacte et accrue, même si l’extériorité de ce qui se passe peut laisser croire à un nouvel équilibre sensoriel.

C’est ainsi que nous devons, maintenant, nous préparer à un nouvel horizon : englobant et insaisissable, mais d’une rigidité surprenante. Cet horizon semble se manifester d’une façon representative dans les dernières manifestations des arts électroniques. Celles-ci sont probablement l’expression la plus visible de cette nouvelle réalité. La temporalité qui les caractérise, dans son hybridation à l’espace, semble générer des modèles très sophistiqués et reconductibles, pour l’essentiel, à une dynamique autre que celle d’un déploiement temporel. Egalement pour la dimension acoustique : loin d’être la manifestation d’un rééquilibrage sensoriel, elle est, paradoxalement, l’expression de l’ouverture d’une nouvelle phase dans la domination du rétinien.

Ce devenir ultra-visuel, ce court-circuitage de l’espace/temps, est donc la manifestation d’une abstraction accrue qui tend à destituer l’aisthêtikos de tout fondement direct. C’est aux artistes de conduire les investigations nécessaires sur les possibles stratégies d’opposition à cet état de choses. Cela à condition d’assumer jusqu’au bout le rôle d’expérimentation existentielle et esth-éthique du sensible que notre siècle semble leur avoir attribué.

En d’autres termes, il s’agit de prendre conscience que l’enjeu aujourd’hui n’est pas tant celui d’un élargissement de la "palette" des matériaux disponibles, mais celui, chose infiniment plus importante, de concevoir les nouvelles stratégies du sensible et de création de l’œuvre à l’époque de l’ultramedialité.

Notes

(1) Nous utilisons ici l’expression générique d’"arts électroniques" pour indiquer, en première instance, l’ensemble des activités qui utilisent et thématisent les nouvelles techniques électroniques : magnétiques/analogiques (magnétophone, vidéo), informatiques (synthèse numérique, réseaux, téléprésence, etc.), optiques (laser, holographie). Cependant, en réalité, l’étendue du domaine recouvert par cette notion d’"arts électroniques" est beaucoup plus vaste. Frank Popper, dans son livre sur L’art à l’âge électronique (Paris, Hazan, 1993), classe, sous cette étiquette d’art électronique ou technologique, l’ensemble des manifestations artistiques produites par la convergence des beaux-arts avec "la science pure et la technologie", convergence qui s’est effectuée, selon cet auteur, au XIXe siècle. C’est précisément cette "évolution qui a conduit, à la fin du XXe siècle, à ce que l’on peut appeler l’art technologique ou électronique" (page 7). Cette définition de Popper montre clairement le lien insécable entre technique et arts électroniques, ce qui fait que ces derniers ont tendance à déborder sur un ensemble de champs disciplinaires qui sont très éloignés, si non carrément étrangers au domaine esthétique traditionnel. C’est ainsi que certains artistes, dans une approche de plus en plus technicienne, développent, par exemple, des algorithmes génétiques ou s’appliquent aux "nano" et "macro" technologies, tandis que d’autres travaillent dans une volonté "post-humaine" en cherchant à hybrider machine et biologique. Il faut donc entendre la notion d’arts électroniques dans cet ample éventail sémantique qui va bien au-delà de la seule application de l’électronique aux traditionnelles disciplines artistiques.

(2) Jacques Ellul, La technique ou l’enjeu du siècle, Paris, Economica, (1950 et 1960) 1990, p. 130.

(3) Ibidem, p. 19.

(4) Ibidem, p. 130.

(5) J’ai forgé la notion d’"ultramedialité" à cheval des années 1980 et 1990. J’en ai parlé dans plusieurs textes dont voici quelque référence bibliographique : Roberto Barbanti, "Oltre l’opera: prassi ultramediali e poEtiche. Note introduttive" in R. Barbanti (sous la direction de), Arte immateriale Arte vivente, Ravenna, Essegi, 1994; idem, "Al di là dell’estetica: ultramedialità e po-eticità", in Mario Costa, Nuovi media e sperimentazione d’artista, Napoli, Edizioni Scientifiche Italiane, 1994; idem, "Lo stato delle cose", Epipháneia, (Napoli: Minervini Editore) n°1, 1996; idem, "Essere di pArte, essere a pArte", Harta Performing, (Monza) 3-29 / 2-97, 1997; idem, "Per una nuova estEtica" in Anton Roca, Das Erd Projekt, Ravenna, Danilo Montanari Editore, 1998 (catalogue d’artiste); idem, "Natura e cultura nell’epoca dell’ultramedialità. Arte, tecnica e chimere", in Actes du Colloque Natura e Cultura Oggi (Sabbioneta, Mantoue - Italie : 2 Octobre 1999); idem, "Ultramedialité et Mail Art" in Jean-Noël Lazlo (Anne Cauquelin et Roberto Barbanti), Correspondances, Toulon, Editions Art-Terre, 1999; idem, "Crisi e persistenza del modello retinico occidentale. Elementi per la definizione di un nuovo paradigma acustico", in Albert MAYR (sous la direction de), Suoni e ritmi dell’ambiente (à paraître dans la collection CIMES-Università degli studi di Bologna, Italie); idem, "L’art techno-cyber : la dérive technicienne de l’esprit utopique de l’art du XXème siècle. L’utopie à l’époque de l’ultramédialité" in R. Barbanti et Claire Fagnart (sous la direction de), L’Art au XXème siècle et l’Utopie, Paris, L’Harmattan (collection PARIS VIII), 2000.

(6) Lewis Mumford, Technique et civilisation, Paris, Seuil, 1950.

(7) Cette "rupture" a été analysée par des nombreux théoriciens. Voir, par exemple, les travaux de Jeremy Rifkin, ou encore le texte, publié récemment, de Michio Kaku (Visions, Paris, Albin Michel, 1999).

(8) Cette volonté de "dépassement" spatio-temporel, n’épuise pas à elle seule la signification globale de la technique, mais elle en révèle un de ses traits fondamentaux.

(9) Nous avons un exemple significatif, courant et généralisé de cette "pré-détermination" dans les jeux vidéo.

(10) Nous avons des cas de figure précis et éclatants, comme par exemple : le walkman, et plus en général l’amplification du signal sonore, qui modifie l’ensemble des conditions d’écoute et de perception (au-delà de pouvoir provoquer des dégâts momentanés ou permanents à l’appareil auditif); la vision figée du hublot, espèce de lucarne-écran informatique dont nous a parlé Virilio, qui caractérise le regard depuis l’avion ou le TGV; l’énergie électrique ou le moteur à combustion interne qui, en changeant le rapport signal/bruit, modifient le seuil de perception acoustique dans les contextes où ils sont présents (comme nous l’a expliqué Murray Schafer avec sa notion de "tonalité"); la surenchère polluante des images visuelles et acoustiques désormais omniprésentes; mais encore, sur les plans "matériel" et énergétique : tous les produits chimiques, génétiques, moléculaires et tous les types de rayonnement, de champ électromagnétique, etc. L’ensemble de ces réalités contribue, d’une façon indiscutable, à modifier aussi bien les conditions matérielles que les grilles d’interprétation inhérentes à la perception.

(11) Dans leur ensemble, ces instruments sont de facto inaccessibles à tout individu "isolé" : soit en termes d’accès réel, soit en termes de connaissances spécifiques requises pour pouvoir les utiliser. Il est évident que l’individu en tant que tel, à partir de ses seules capacités perceptives, n’a plus aucune possibilité de s’orienter dans l’univers dans lequel il évolue.

(12) Il ne s’agit pas seulement des milliers de molécules de synthèse ajoutées chaque année à la nature, mais bien au-delà, comme on l’a affirmé, de l’ensemble de la production industrielle : processus de fabrication et marchandise produite. Que l’on pense, pour donner un exemple tout à fait anodin et au quotidien, aux tonnes de chape de pneus consommées chaque jour sur les routes du monde entier. Bien que pulvérisées et indétectables, elles restent, puisque non biodégradables, dans notre environnement à l’état moléculaire. (Voir à ce propos : Aldo Sacchetti, L’uomo antibiologico, Milano, Feltrinelli, 1985).

(13) Abraham A. Moles, Les Musiques Expérimentales, Zurich, Editions du cercle d’art contemporain, 1980, p.15.

(14) Pierre Restany parle de ce basculement de l’art de "l’esthétique dans l’éthique" dans son ouvrage : L’autre face de l’art, Paris, Galilée, 1979.

(15) Au sujet de la notion d’ "esth-éthique" (ainsi que de celle de "po-éthique" intimement reliée à celle-ci) voir : Roberto Barbanti, L’arte nell’epoca della barbarie, Ravenna, Essegi, 1993; le court texte Verità e Bellezza, Riccione, VA.C.A., 1995 (édition hors commerce); ainsi que le déjà cité Arte Immateriale Arte Vivente.

(16) Cette dernière mouvance trouve, bien entendu, dans différents mouvement artistiques ses références historiques : le Futurisme, le Constructivisme, le Bauhaus, puis le Spatialisme de Fontana, le Op Art, le Pop Art, l’Art Cinétique, l’Independent Group de Londres, etc. La rupture fondamentale qui se manifeste avec l’art techno-cyber consiste, comme on vient de le dire, à vouloir s’hybrider au medium et pas simplement à l’utiliser et à le thématiser en tant que tel.

(17) Ayant déjà épuisé et maîtrisé l’espace planétaire, il s’agit maintenant de plier et domestiquer le temps.

(18) En ce qui concerne Nam June Paik, voir le numéro 47 (avril 1981) de la revue Art Press (Spécial Vidéo), pp. 7-9. Par rapport à Bill Viola, voir : Cahiers du Cinéma, Hors série n°14, "Où va la vidéo?", 1986, p. 70.

(19) "Au fond, l’image de synthèse n’existe pas. Elle n’appartient ni à un lieu ni à un temps propres, elle est littéralement utopique et uchronique". Edmond Couchot, "Rupture et continuité, les incidences du numérique sur l’art contemporain, Les Papiers, n° 12, Automne 1993, Toulouse (P.U.M.), pp. 15-21.

(20) Par "acoustique" on entend tout ce "qui concerne l’ouïe" (du grec akoustikos) et tout ce qui est relatif au son et à ses manifestations physiques. En particulier, nous faisons surtout référence ici à l’utilisation qu’en a fait Marshall McLuhan ainsi qu’à la problématique développée par celui-ci sur ce sujet.

(21) J’ai développé plus en détail cette problématique dans deux articles récents : "Dal retinico all’acustico : elementi per la definizione di un nuovo paradigma" in Albert Mayr (a cura di), Il paesaggio sonoro, Roma, Università "Tor Vergata", 1997, pp. 68-85; "Autour du rétinien. Crise et consolidation d’un paradigme", Cinergon, n° 6-7, 1999, pp. 13-34.

 

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